La physique nucléaire

 

La physique nucléaire est la science qui étudie non seulement le noyau atomique en tant que tel (élaboration d'un modèle théorique) mais aussi la façon dont il interagit lorsqu'une particule arrive « à proximité » (l'ordre de grandeur est 10-12 cm, on parle couramment en physique nucléaire de section efficace dont l'unité est le barn soit 10-24 cm2) du noyau (obtention de résultats expérimentaux). Après un bref rappel historique, cet article se consacre à décrire :

  • la structure nucléaire, qui vise à comprendre comment les nucléons (protons et neutrons) interagissent pour former le noyau.
  • les mécanismes des réactions nucléaires dont le but est de décrire les différentes façons qu'ont les noyaux d'interagir : fission, fusion, diffusion (élastique, inélastique), radioactivité...
  • les domaines d'applications de la physique nucléaire : de la médecine à l'astrophysique, en passant par la production d'énergie, tous ces domaines d'activité exploitent la physique des interactions rayonnement-matières.
  • les organismes de recherche en physique nucléaire, en France et dans le monde

La matière est constituée de molécules, elles-mêmes constituées d'atomes. Ces atomes sont formés d'un noyau central entouré par un nuage électronique. La physique nucléaire est la science qui s'intéresse à l'ensemble des phénomènes physiques faisant intervenir le noyau atomique. En raison de la taille microscopique de celui-ci, les outils mathématiques utilisés s'inscrivent essentiellement dans le cadre du formalisme de la mécanique quantique.

Le noyau atomique est constitué de nucléons, qui se répartissent en protons et en neutrons. Les protons sont des particules qui possèdent une charge électrique élémentaire positive, alors que les neutrons sont des particules neutres. Ils n'ont qu'un moment magnétique, et ne sont donc que peu sensibles au champ électromagnétique, contrairement aux protons. Si l'on assimilait le noyau atomique à une sphère dure, le rayon de cette sphère serait de quelques fermis, 1 fermi valant 10-15 mètres (1 fermi = 1 femtomètre). Les noyaux possédant la même valeur de Z, c'est-à-dire le même nombre de protons, et n'ayant pas le même nombre de neutrons sont appelés isotopes.

Jusqu'au tournant du XXe siècle, on a cru que les atomes étaient les constituants ultimes de la matière. La découverte de la radioactivité en 1896 par Henri Becquerel et les études qui suivirent, en particulier par les époux Curie, commencèrent de suggérer que les atomes étaient peut-être eux-mêmes des objets composés. Comment, sinon, la matière pourrait-elle émettre spontanément des particules comme dans le cas de la radioactivité alpha ?

C’est en 1911 que Rutherford découvrit que les atomes semblaient effectivement être des objets composés. En analysant la diffusion de particules alpha émises par une source radioactive à travers une feuille d'or, il en vint à conclure que le plus simple semble de supposer que l'atome contient une charge [électrique] centrale distribuée dans un volume très petit ("it seems simplest to suppose that the atom contains a central charge distributed through a very small volume...", Philosophical Magazine, Series 6, vol. 21, May 1911, p. 669-688). Le modèle de Rutherford de l'atome était donc un noyau central possédant une charge électrique entouré par des électrons maintenus en orbite par l'interaction électromagnétique. Il avait déjà été proposé en 1904 par Nagaoka.

En 1919, Rutherford toujours découvre l'existence dans le noyau du proton, particule possédant une charge positive élémentaire e, mais possédant une masse beaucoup plus grande que celle de l'électron (qui lui a une charge électrique élémentaire négative). En 1932, Chadwick met en évidence l'existence du neutron, particule très semblable au proton, hormis le fait qu'il ne possède pas de charge électrique (d'où son nom). À la même époque, Heisenberg propose que le noyau atomique est en fait constitué d'un ensemble de protons et de neutrons

L'interaction forte maintient la cohésion des nucléons au sein du noyau. C'est la plus intense des quatre forces fondamentales de la nature (d'où son nom). Elle se caractérise par le fait qu'elle est fortement attractive à courte distance (lorsque les nucléons se rapprochent très près l'un de l'autre), répulsive à « moyenne » distance, et s'annule à longue distance. Les protons étant des particules chargées, ils interagissent également via l'interaction coulombienne. Si le nombre de protons dans le noyau est important, cette dernière prend le pas sur l'interaction forte et les noyaux deviennent instables. La quantité d'énergie qui assure la cohésion du noyau est appelée énergie de liaison du noyau.

Une réaction est dite nucléaire lorsqu'il y a modification de l'état quantique du noyau. Participent alors à la réaction les nucléons constituant le noyau, mais également d'autres particules, tels les électrons e-, les positons e+...

Les réactions nucléaires peuvent être de plusieurs types. Pour ne citer que les plus importantes :

  • la fission : un noyau lourd se brise en plusieurs fragments. C'est ce type de réaction qui est mis en œuvre dans les bombes atomiques de type A et dans les centrales nucléaires électrogènes.
  • la fusion : plusieurs noyaux légers fusionnent. C'est le mode de production d'énergie des étoiles. La fusion nucléaire est à la source de la nucléosynthèse qui permet d'expliquer la genèse de tous les éléments du tableau périodique de Mendeleïev et de leurs isotopes. C'est également le type de réaction qui est utilisé dans les bombes dites à hydrogène (Bombe H). L'utilisation de la fusion à des fins de production d'énergie civile n'est pas encore maîtrisée. Sa maîtrise est l'objet du projet international ITER.
  • la radioactivité : un noyau émet une ou plusieurs particules spontanément. On distingue :
  • la spallation (en anglais knock-out reaction) : des particules légères (neutrons par exemple) sont envoyées sur un noyau cible et expulsent un ou plusieurs nucléons de ce noyau.
  • la multifragmentation
  • les réactions de diffusion : le projectile (un photon, un nucléon ou un ensemble de nucléons) voit sa trajectoire modifiée. On parle de diffusion élastique lorsqu'il y a conservation de l'énergie cinétique du système {projectile-cible}. Dans le cas contraire, on parle de diffusion inélastique : une énergie potentielle supplémentaire (qui provient du noyau) est libérée au moment de l'interaction. Lorsque la particule incidente est un photon, on nomme différemment la diffusion, selon le phénomène physique mis en jeu :
    • La diffusion de Thomson concerne un photon qui interagit avec un électron libre. On parle de diffusion cohérente car la longueur du photon diffusé est la même que l'incidente (voir le point suivant). La diffusion Thomson est une diffusion élastique qui a lieu généralement entre quelques dizaines de keV et 100 keV.
    • Lorsque le photon a une énergie incidente supérieure (au dela de 100 keV environ), l'énergie du photon réémis est inférieure à celle du photon incident. On parle d'effet Compton (variation de la longueur d'onde). La diffusion Compton est également une diffusion élastique (la différence d'énergie entre le gamma incident et celui réémis est transmise à l'électron). La diffusion Thomson est un cas particulier de la diffusion Compton (lorsque l'énergie du photon incident est très inférieure à 511 keV). La diffusion Thomson n'est donc pas au sens strict une diffusion cohérente mais la différence de longueur d'onde entre la particule émise et l'incidente est trop faible pour être mesurée.
    • Lorsque le photon incident interagit avec un électron apparié (plus précisément avec une molécule ayant un moment dipolaire comme N2 ou O2 qu'on retrouve dans l'air -- le barycentre du nuage électronique d'un (des 2) atome ne coïncide pas avec le noyau), on parle de diffusion de Rayleigh. La diffusion de Rayleigh est parfaitement cohérente. Elle prédomine pour les photons de quelques eV. Elle explique notamment la couleur bleu du ciel.
  • effet photo-électrique : le photon incident "disparait" en transmettant son énergie sous forme d'énergie cinétique à un électron. Phénomène prédominant pour les photon d'énergie inférieure à quelques dizaines de keV.



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